Tapie, une affaire d’Etat

Le président du Modem, François Bayrou, avait été l’un des premiers à dénoncer cet arrangement. Et forcément, il jubile en ce moment en voyant les têtes commencer à tomber, dont Stéphane Richard, le Pdg d’Orange.

Tout est assez simple en définitive. Nommé ministre sous Mitterrand en 1992, Tapie est sommé de vendre Adidas qu’il vient de racheter pour éviter tout soupçon de conflit d’intérêts – ce n’est pourtant pas le genre de la maison ! Il fait appel à la Société de Banque occidentale, une filiale du Crédit lyonnais, qui est elle une banque publique. Elle vend Adidas au prix minimum fixé par Tapie en 1993. Jusqu’ici, tout va bien. Tout se complique lorsqu’empêtré dans des problèmes financiers et en conflit avec le Crédit lyonnais, Bernard Tapie se rend compte en 1994 que l’acquéreur d’Adidas n’est autre que le Crédit lyonnais via deux sociétés off-shore. En clair, la banque, flairant la bonne affaire, s’est offert Adidas. Or c’est évidemment illégal. Une banque sollicitée dans un rôle de conseil et de vendeur ne peut se porter acquéreur.

Après 15 ans de procédure, un arbitrage des plus opaques est décidé qui donne raison à Bernard Tapie et lui accorde 403 millions d’euros, dont 45 millions au titre du préjudice moral. Et personne ou presque ne réagit. Comme si tout était normal. Bernard Tapie s’était fait une spécialité du rachat d’entreprises en difficulté. Sa technique était simple. Il achetait le tout pour une bouchée de pain, licenciait une grande partie du personnel, modernisait un peu l’usine et revendait avec une belle plus-value. Le Crédit lyonnais a donc en quelque sorte fait du… Tapie ! Sauf que les ouvriers laissés sur la paille n’ont que leurs yeux pour pleurer alors que l’escroc l’homme d’affaires se voit généreusement octroyer 45 millions rien qu’au nom du préjudice moral ; ce qui constitue une énorme pantalonnade comme seule notre république irréprochable en a le secret.

A présent, on tente de voir qui a donné ce fameux ordre de procéder par un arbitrage et de signer un chèque public (c’est bien le contribuable qui paye !) de près d’un demi-milliard à Bernard Tapie. Sont cités Christine Lagarde, Stéphane Richard (qui officiait dans le Cabinet de la ministre), mais aussi Claude Guéant ou encore un certain Nicolas Sarkozy. D’ailleurs, beaucoup avaient dit l’époque que Nicolas Sarkozy avait offert cet argent en échange du soutien de Bernard Tapie à sa candidature (ce qu’il a d’ailleurs fait, appelant clairement à voter Nicolas Sarkozy). On prête d’ailleurs à Tapie ces propos le soir de l’élection de Sarkozy : « Ca y est : j’ai les sous » même s’il a toujours démenti. D’un autre côté, on le voit mal s’en vanter alors que la décision de la procédure arbitrale n’a été officiellement décidée qu’en octobre 2007…

Alors, François Bayrou, à juste titre, en rajoute une couche au micro de RTL : « Ça prend l’allure d’un tremblement de terre, cette réunion présente un degré supplémentaire de gravité, c’est une réunion d’organisation de cette manœuvre qui repose sur le fait qu’on se met d’accord à l’avance sur la manière dont les choses vont se passer. C’est une connivence ouverte, organisée entre les plus hauts responsables de l’Etat et Bernard Tapie, au profit duquel on va soustraire des centaines de millions aux Français ». Tout est dit !

2 thoughts on “Tapie, une affaire d’Etat

  1. Tcho says:

    Je n’ai pas franchement compris :evil:

    Le crédit Lyonnais n’avait pas le droit de racheter, on annule la vente et basta, je ne comprend pas où est le préjudice, doit être bien compliqué pour qu’un illuminé comme moi n’y comprenne rien :shock:

    Le crédit Lyonnais conseille qui, en quoi est-ce incompatible avec le football, etc. :?:

    Et en quoi est-ce le contribuable qui paie, le Crédit Lyonnais, c’est privé désormais, non :?:

  2. admin says:

    Pas aussi simple que cela. La supercherie a été découverte bien après. Entre temps, Adidas avait un nouvel actionnaire (la banque l’a revendu à Jean-Louis Dreyfus). Le truc, c’est qu’une banque conseil ne peut pas racheter quelque chose qu’elle est chargée de vendre et pour lequel elle prend évidemment une grosse commission. Du coup, ils ont suggéré à Tapie cette excellente opportunité alors qu’en fait, elle n’en était pas une. Et la banque a revendu par la suite Adidas avec une plus-value de 400 millions d’euros (la somme qui a été redistribuée à Tapie). Et le tout s’est fait d’une manière des plus opaques avec d’obscures succursales domiciliées aux Bahamas et le nom du Crédit lyonnais n’apparaît qu’en grattant vraiment bien.

    Et le Crédit lyonnais était à l’époque une banque publique d’où la note laissée à l’Etat. Elle est pas belle la vie?

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