Quand l’adolescence rime avec alcoolisme

Une étude, publiée par le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH), ce jour se penche sur la consommation d’alcool des adolescents français. Ils sont un élève sur six au collège à déclarer avoir déjà été ivres et trois sur cinq au lycée. En moyenne, un élève de terminale sur quatre dit boire régulièrement de l’alcool, soit 10 fois par mois.

Les choses progressent très vite. S’ils ne sont que 7% à avouer avoir déjà été ivres un jour en 6e, ils sont 69% en terminale. De même, l’usage régulier passe de 3% en classe de 4e à 24% en terminale. Et ils sont 39% à avouer la consommation d’un verre d’alcool dans le mois précédent l’enquête en classe de 4e contre 79% en 1ère et en terminale. Selon l’étude, l’alcool est la « substance psychoactive la plus précocement expérimentée à l’adolescence ». C’est d’autant plus préoccupant que l’initiation a bien souvent lieu dans le cadre familial. 59% des élèves de 6e affirment avoir déjà bu de l’alcool avec leurs parents quand ils sont 93% en terminale.

Pour les premiers, c’est souvent par le biais de boissons festives comme le cidre ou le champagne. Les seconds revendiquent eux comme les adultes la bière ou les alcools forts. Une étude conjointe de l’Observatoire français des drogues et toxicomanies (OFDT), de l’Inserm et de l’Inpes montre une grande différence entre les sexes. Les jeunes filles sont ainsi deux fois moins nombreuses que leurs homologues masculins à boire de l’alcool régulièrement. Toutefois, l’écart tend à se réduire et les ivresses féminines sont de plus en plus fréquentes. Entre 2005 et 2010, les ivresses répétées des étudiants toucheraient deux fois plus de personnes et un tiers de l’échantillon portant sur 2 838 personnes avouait s’adonner régulièrement à de grosses soirées alcoolisées (au moins 6 verres).

Le BEH se veut donc alarmant : « Les premières consommations régulières comme les premières ivresses se développent fortement pendant les ‘années collège’ pour s’intensifier tout au long du lycée ». Cette banalisation se retrouve à tous les niveaux et Marie-Josèphe Saurel-Cubizolles, épidémiologiste et l’un des auteurs du rapport rappelle qu’une étude réalisée au CHU de Nantes en 2008 révélait que 63 % des femmes enceintes de la région déclaraient boire de l’alcool. Le BEH estime le nombre de victimes à 49 000 en 2009. Quelque 36 500 hommes et 12 500 femmes en seraient morts soit directement, à cause de maladies « entièrement attribuables à l’alcool » comme la cirrhose du foie, soit indirectement via des pathologies qui lui sont « partiellement attribuables ».

Le professeur Michel Lejoyeux, qui dirige le service de psychiatrie et d’addictologie de l’hôpital Bichat à Paris, dresse un constat sans équivoque sur l’addiction des jeunes à l’alcool : « Ils ont intégré l’idée que la fête c’est l’ivresse. L’alcool n’est plus seulement vécu comme un moyen de se désinhiber: on est passé de l’alcool festif à l’ivresse festive. La consommation alimentaire (le vin servi au moment des repas) disparaît au profit d’une consommation addictive et toxique qui explose ».

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