Etes-vous un psychopathe en devenir ?

Déjà un journal allemand, le Tagesspiegel, soulignait au début du mois, non sans malice, que de ne pas posséder de compte Facebook ferait de nous de dangereux psychopathes. Pour en arriver à cette conclusion, le quotidien s’était penché sur quelques noms qui avaient défrayé la chronique (James Holmes, Mohammed Merah et Anders Breivik). Ils avaient tous en commun, hormis leurs tueries respectives, d’être absents des réseaux sociaux. Ainsi, le fait de ne posséder aucun compte peut devenir suspect puisqu’on peut supposer que vous avez quelque chose à cacher. Et si la nouvelle peut faire sourire, elle est néanmoins très sérieuse puisque cela devient un critère subjectif d’embauche dans certains entreprises. Des psychologues lient en effet l’absence sur les réseaux sociaux à un vide affectif. En gros, si vous n’allez pas sur Twitter, Facebook et comparses, c’est pour ne pas reproduire le vide de votre vie et vous renvoyer à nouveau une image négative de vous.

Cette thèse est alimentée par plusieurs équipes de recherches dont une basée à l’université de Lausanne, en Suisse. Selon cette dernière, il y aurait une corrélation entre la dépression chez les jeunes et le temps passé sur internet, en forme du U. Les plus actifs et ceux qui en sont absents seraient les sujets les plus à risque. Cependant, il serait bon de rappeler qu’on peut encore avoir une vie sociale en 2012 sans compter un seul follower ! Si, si, c’est possible, je vous assure.

Le précédent Quechua

Toutefois, cette dernière assertion doit être martelée pour paraître crédible tant le processus semble inéluctable. Pour preuve, la polémique qui agite le net en ce moment. L’entreprise Décathlon vient ainsi de passer un palier en faisant de l’activité et de l’influence sur les réseaux sociaux un critère objectif d’embauche. L’influence d’une personne sur le net peut être mesuré par des outils dont le plus connu est Klout. Et c’est ainsi un score de 35 –un score assez élévé- qui est exigé par la branche montagne de l’entreprise, Quechua, pour son annonce de recrutement. Elle cherche un stagiaire en Community Management, qui devra assurer la « responsabilité du recrutement et de l’animation des communautés (Facebook, Twitter, Quechua Club, Google+, Youtube, Viméo, Dailymotion, Pinterest, Instagram) », et la gestion de toutes les opérations de communications sur Internet. Elle précise que le candidat devra être de formation bac+4 ou bac+5 en communication ou marketing, maîtriser les réseaux sociaux et donc avoir un score Klout d’au moins 35. D’où la polémique.

Julie Bordez, la responsable du digital et de la presse pour Quechua, contactée par 20 Minutes a avoué sa surprise face au tollé provoqué par cette annonce tout en regrettant cette dramatisation. Elle s’avoue surtout ravie du buzz engendré. Au sujet du score Klout, elle dit que c’est pour « montrer que Quechua recherche un passionné des réseaux ». Elle précise aussi que « le score demandé est assez bas pour laisser à beaucoup de monde la possibilité de postuler » et que ce n’est pas un critère d’exclusion : « Si on reçoit une candidature de quelqu’un de super, qui a des expériences, qui aime la montagne, et qui a un Klout de 33, bien sûr qu’on va le prendre ». Et pour ne pas se laisser submerger par le flot de critiques, la marque devait réagir sous peu : « On va rebondir sur Twitter ».

Je ne sais pas si son exemple est très pertinent car elle sous-entend qu’une personne avec un klout moins élevé qu’exigé dans l’annonce pourrait être prise tout en parlant d’un klout de 33, très proche du 35 initial. Et à 32, on passe à la trappe ? Il va vite falloir que je rebondisse sur les réseaux en alimentant mon compte Facebook (moribond et créé pour participer à un jeu pour une personne tierce) ou créer un compte Twitter (damned, je n’en ai point). Et si j’étais bien finalement un psychopathe en puissance ?